J23 Aroue


19km • Hier soir, entre toutes les possibilités qui s’offraient à moi face à une douleur naissante à la jambe, j’avais pris la décision de rester un jour sur place à Navarrenx pour donner le temps à mon corps de se reposer un peu, et éviter que la douleur au tibia ne s’accentue.

Au petit matin, je me lève avec les pèlerins, pour déjeuner avec eux, pour échanger quelques mots, leur dire au revoir.

Un échange avec Fred et Isa m’a donné en une fraction de seconde l’envie de choisir une autre option… m’accrocher encore un peu, me libérer du poids de mon sac, pour diminuer l’effort physique, mais avancer tout de même, ne pas rester complètement statique. Nous allions tous nous retrouver le soir au même gîte avant que chacun prenne des chemins différents. C’était décidé, je marcherai aujourd’hui, quelque soit mes facultés physiques.

J’ai rapidement préparé le matin même un colis pour la poste avec toutes mes affaires de camping… 3,6km en moins sur le dos, ma journée de marche peut commencer. Je mettrai le temps que je mettrai, à l’image de la fable du lièvre et la tortue, je n’ai « que » 19km à parcourir, je ferai autant de pause que nécessaire, je me masserai et je boirai bcp. Ce soir, je serai au gîte et je réserve la surprise de ma présence à mes amis pèlerins…

Colis retour

NB : je me vois contrainte de retourner tous vos messages mais ils m’accompagnent encore…

Se masser
Le plus dur est derrière

La journée a été éprouvante, mais tellement enrichissante avec beaucoup d’émotions à affronter. Une journée où j’ai pu marcher seule, me connecter à mes sensations.

Help
Que dieu soit avec moi 💪

Outre les événements très concrets du quotidien que je partage en partie ici, le chemin nourrit aussi beaucoup l’esprit. Il fait mûrir des pensées profondes. Chaque événement du quotidien du chemin, si on prend le temps de l’observer et de l’écouter, est une métaphore de la vie.

Si nous acceptons d’ouvrir notre cœur et notre âme sur le chemin, de faire taire les maux du corps, il se produit des choses merveilleuses.

Rivière

J’apprends tous les jours à mette un pas devant l’autre sans vouloir tout maîtriser, à être attentive aux autres, à me connecter à eux. C’est en apprenant à se laisser guider par son cœur que la marche devient plus lumineuse, qu’elle prend tout son sens…

Il y a sur le chemin, ces rencontres qui vous marquent à jamais. Ces rencontres qui peuvent réellement changer votre façon d’approcher la vie.

Eglise Lichos
Cloche

En toute honnêteté, je rencontre aussi nombre de pèlerins qui ont davantage l’âme de randonneurs consommateurs d’une semaine de vacances peu chère en empruntant faussement la casquette de pèlerin, qui voyagent avec des valises pleines à craquer transportées de gîtes en gîtes, qui n’ont pour seul objectif l’atteinte de leur point d’arrivée dans un temps imparti, contraints de marcher vite, et qui n’hésitent pas à prendre un taxi pour éviter la pluie ou prendre des « raccourcis » du chemin pour gagner du temps… sans être dans le jugement face au choix de ces personnes, je suis désolée pour elles, qu’elles n’aient pas (encore) réussi à affronter leurs peurs, à se libérer des carcans de notre société qui nous en demande toujours plus, à vraiment VIVRE le chemin.

Je ne suis qu’à 70km de Roncevaux… juste derrière les Pyrénées…